L’architecte Men Duri Arquint vit au cœur de Coire -ville la plus ancienne de Suisse au charme fou avec ses montagnes en toile de fond et ses ruelles tortueuses-
dans une maison construite à la fin des années septante par Andres Liesch (1927-1990) architecte Grison. On pénètre dans le bâtiment austère depuis la rue piétonne paisible.
C’est une maison verticale, très étroite, réalisée sur trois étages, au style clairement influencé par l’esthétique japonaise.
Andres Liesch a déjoué avec prouesse les limites d’une surface de parcelle extrêmement réduite et a fait preuve d’une ingéniosité brillante.
On découvre avec étonnement que les lieux paraissent généreux et que l’on ne s’y sent jamais à l’étroit. Une attention particulière a été portée sur l’économie d’espace,
ce qui confère aux lieux un petit air de navire. On trouve du rangement partout ; des niches, des armoires, des étagères, des tiroirs dissimulés et les meubles intégrés à
l’architecture s’y fondent harmonieusement. Comme conçu par Andres Liesch à l’origine, le bureau d’architecte de Men Duri a naturellement trouvé sa place au
rez-de-chaussée. Le salon, salle à manger, cuisine est tellement bien pensé que sa taille est tout simplement parfaite.
En haut on trouve une chambre à coucher sous le toit mansardé. A l’intérieur la sobriété est de mise, ce qui n’empêche pas certaines pièces de mobilier au design
intemporel de trouver naturellement leur place. Beaucoup de bois, des murs peints à la chaux, de la pierre naturelle au sol.
L’utilisation de la lumière naturelle est également remarquable ; dans le bureau elle vient du Nord, de larges fenêtres ouvrant sur les maisons historiques offrent un spectacle
serein et un éclairage doux favorisant l’inspiration. Aux étages supérieurs, la lumière est mise en scène de façon plus dramatique ; le soleil s’introduit par des
embrasures étroites, situées côté remparts, sous le toit une longue série de hublots adornent la charpente en bois, des lucarnes complètent l’œuvre.
Comme le dit Men Duri, on se sent enveloppé et en sécurité comme dans un cocon.
Men Duri
Comment as-tu découvert cette maison ?
Liesch est une figure importante depuis mon enfance, je connaissais son travail car mes parents, grands admirateurs, me l’avait fait découvrir. Un jour, je me suis garé derrière la rue principale et j’ai traversé les anciens remparts, j’ai donc passé sous la maison réalisée par Andres Liesch. En admirant le bâtiment, j’ai pensé que je pourrais vivre ici… Je ne savais pas que trois ans plus tard je m’y installerais ! Lors d’une soirée, j’ai rencontré la fille de Andres Liesch, nous avons parlé de la maison sous les remparts et elle m’a spontanément proposé de m’y installer. Elle m’a expliqué qu’il l’avait conçue comme une maison-studio et espérait qu’un architecte viendrait s’y installer un jour. Elle était inoccupée et l’occasion était trop belle pour la laisser passer.
As-tu fait des transformations ?
C’était parfait tel quel ! Je n’ai d’ailleurs emménagé qu’avec peu d’effets personnels, les meubles à tiroir très pratiques pour ranger des plans d’architecte, une grande table de travail sur tréteaux étaient déjà là, ainsi que le lit et quelques chaises. Plusieurs meubles sont intégrés à l’architecture : banquette, table de travail sur la mezzanine, de nombreuses étagères… L’éclairage général parfaitement élaboré fait aussi partie de l’architecture d’origine.
Qu’est-ce que tu aimes particulièrement dans cette maison ?
Cette réalisation magnifique offre une division spatiale pour ainsi dire parfaite ; elle permet une circulation aisée entre les sections individuelles tout au long de la journée, que j’aime commencer assis à la table qui se trouve près de la cuisine. Je planifie et organise, je lis mes mails et fais des recherches. Plus tard, si j’ai besoin d’une petite sieste, je me couche sur la banquette intégrée qui se trouve dans le salon. La zone de sommeil à l’étage supérieur a quelque chose d’une grotte où l’on se sent en sécurité et fait oublier où l’on se trouve. J’admire la qualité technique énorme qu’il a fallu à Andres Liesch pour élaborer cette maison, il était carrément accro à la qualité ! Les matières sont solides, simples et pures, Liesch s’est limité à trois matériaux : le béton, le bois et la pierre. J’admire également l’atmosphère qu’il a su créer. Ce lieu offre une qualité de vie qu’il est rare de trouver en plein coeur d’une ville.
Quelle importance ont les objets dans ta maison ?
J’aime la photographie et l’art, je suis intéressé par le visuel. Chez moi tous les objets et tableaux doivent pouvoir être déplacés : comme moi ils ne sont pas immobiles et j’aime les déloger au gré de mes envies. Quand je travaille intensément je préfère n’avoir rien devant les yeux qui puisse détourner mon attention. Ou au contraire je peux décider de me servir d’une image comme inspiration.
Décris-nous la vie dans une petite ville ?
Mon bureau est situé à deux minutes à pied de mon logis. Ce que j’apprécie tout particulièrement à Coire est que tout est à distance de marche, quel luxe et gain de temps ! Le temps gagné se transforme en repos. L’espace public a été conçu à une échelle humaine, dans les quartiers anciens comme dans les quartiers plus récents.Bien que tout soit petit et compact, Coire offre une vie culturelle riche. Le jeudi il y a des concerts de jazz de qualité dans un bar magnifique, j’aime aussi le « Café Zschaler » l’intérieur a été réalisé par Rudolf Olgiati. Ou le nouveau « Art Café » dans la Villa restaurée de la Planta. Mais j’apprécie le changement et je passe aussi beaucoup de temps en Basse-Engadine et à Zurich.
You must be logged in to post a comment.